Corinne Tichadou

artiste – peintre

DES ANGES SUR LA TERRE

Mon sujet vient d’une chanson « Les anges noirs» interprétée par Antonio Machin.

« … Pintor que pintas iglesias
Pinta angelitos bellos
Pero nunca te accordasse
De pintar un angel negro. . . »

Mon grand père, réfugié espagnol politique chantait cette chanson et je l’écoutais, fascinée.
Comme lui, je ressens fortement les choses, je comprends les insoumis, les incompris, les exilés.
Il a fallu du temps pour que les anges deviennent mon sujet, la matrice et la quête de mes interrogations.
En 2013 j’ai commencé à réaliser une série d’anges sur petits formats 20x20cm. Les anges que je peins sont noirs, bleus gris, jaunes sales, terre, vieux roses. Ils n’ont pas de visage, pas de sexe, pas d’âge. On ne peut les identifier car ils sont de toute origine. L’ensemble de ces peintures fonctionne comme une fugue.

Dans les textes religieux, dans la mythologie, les anges sont les missionnaires de dieu auprès des hommes. Cela me plait. L’idée de réunification universelle m’intéresse et c’est cela que je veux mettre en avant dans ma peinture. Je donne à voir des anges en lévitation dans un espace indéfini. Ils sont les bienfaiteurs de notre monde moderne. Ils sont là pour nous soutenir, nous fortifier dans nos moments de faiblesses, soulager nos maux et nos blessures, nous éclairer sur nos doutes, nous réconforter dans nos moments douloureux et nous soutenir face à la mort. A l’heure où la violence, l’arrogance, le pouvoir, la trahison sont omniprésents dans nos vies, l’image d’anges pleins de sagesse, d’humanité et de compassion est la bienvenue.

Corinne Tichadou

 

La chèvre et l’ange
Peinture sur carton 20×20

[6 oct. 2018]

Cette peinture, comme toutes celles de Corinne Tichadou, permet beaucoup d’interprétations jouissives possibles. Il y en a une qui peut passer inaperçue, et qui est la rencontre toute simple (parce qu’elle va de soi quand on traverse le parvis de la théologie pour entrer dans le palais des symboles) entre l’antique mythologie (la chèvre) et le symbolisme chrétien (cet ange remarquable; christ en gloire vaguement à queue de sirène). Sur ce fond gris et dans ces contours de gros traits sombres qui sont les marques du style de Corinne, le jeu du contraste des couleurs et des modes de “remplissage” des figures (le blanc plutôt uni de la chèvre et les tâches à dominante rougeâtre du Christ, qui vont si bien à l’un et à l’autre) sont encore des choix remarquables, contribuant à la puissance tout à la fois symbolique, esthétique et émotionnelle de cette œuvre. Cette puissance vient de ce que Corinne Tichadou vise toujours l’épure. Une peinture comme celle-ci  montre bien en quoi elle est une véritable artiste : une visionnaire malgré elle (de son propre aveu), exactement comme l’étaient les jeunes bergères de Delphes qui se retrouvaient en transe quand elles étaient dans le creux du rocher. L’atelier d’une véritable artiste est un creux de rocher où les dieux parlent aux hommes d’une manière obscure.

Olivier Rimbault

CORINNE TICHADOU, IL ÉTAIT UNE FOIS….

Sur la droite, un hippocampe gris-vert, rayé comme il se doit mais plus proche du serpent de mer que d’un petit cheval, flotte sur un fond clair dont la texture évoque instinctivement une fresque antique. Dans la partie gauche du tableau, une fleur rose dans un fourreau de feuilles vertes jaillit triomphalement d’un petit pot, bancal et charmant, probablement sans âge, tacheté d’un bleu turquoise enfantin. Il y a tant de vie dans ce bouquet de couleurs que parler de nature morte serait une aberration. L’ensemble forme une scène singulière, inattendue, et l’audace de cette originalité constitue une des premières qualité de l’oeuvre de Corinne Tichadou qui commence souvent par Il était une fois… Références aux contes, sujets mythologiques, légendes et autres figures archétypales sont les matières premières – avec les couleurs dont elle fait un bel usage – de cette artiste dont la création est également très imprégnée de traditions, de culture catalane et de paysage de ses terres du sud (Port de Collioure, Taureau, Jouteur sétois…). 

Mais on ne saurait la réduire à un territoire tant son expression picturale a une portée universelle et qu’elle puise souvent dans des codes ou des figures exotiques, notamment du côté de l’Orient comme avec cette Déesse indienne plus vraie que nature, ce Samouraï convaincant ou encore un paysage de Montagne enneigé qui évoque immanquablement le mont Fuji. La peinture de Corinne Tichadou respire un joli parfum de liberté mais qui, sous les contours d’une apparente candeur n’est pas dénuée de profondeur. Une oeuvre délicate et affirmée qui mêle peinture, dessin, collage ou gravure avec une grande aisance dans des effets de matière sensibles, pour ne pas dire sensuels. Si Don Quichotte y côtoie régulièrement Saint-Georges terrassant le dragon, des scènes aussi variées que la Fuite en Egypte, des lutteurs de différentes traditions ou des motifs de danse classiques sont des parcelles de l’univers de cette artiste inclassable au geste poétique assuré.

Olivier Rousseau

Corinne Tichadou est une conteuse, en lieu et place du crayon ou de la parole elle emploie son pinceau … et son pinceau en dit long.

Nous partons de loin … Nous pouvons même remonter aux époques égyptiennes ou romaines. Voilà de petits personnages qui surgissent dans des tenues singulières mais que l’on peut découvrir dans les fresques de Pompeï où d’ailleurs. Elle peut faire des bonds passant de la Rome antique au moyen âge : jongleurs, chasseurs, troubadours, êtres étranges se succèdent sur ses tableaux et en rangs serrés courent et s’agitent sur la toile. Personnages aussi quelque fois inquiétants dans son imaginaire infini, elle nous amène sur tous les chemins, du fou du roi nous passons à la vierge et son enfant, les chameaux arrivent à pas lents, chargés de cadeaux, de myrrhe et d’encens.

Nous n’oublions pas le peuple des océans qui lui aussi a sa place dans l’œuvre de Corinne Tichadou. Pieuvres, sirènes, hippocampes montent du fond des mers et viennent, curieux, jeter un coup d’œil sur le monde des terriens, de longues barques venant et allant dont ne sais où, se déplacent sur de longs fleuves tranquilles, bordés de palétuviers.
De sages petites filles aux robes de princesse nous surveillent du coin de l’ œil, sont-elles si innocentes que celà ?
Et quant aux créatures étranges elles viennent en foule créée dans son imagmaire.

Corinne est un bon peintre, pouvant travailler toutes les techniques et tout cela pour notre grand bonheur.
Il faut la suivre sur le chemin où chacun de nous va pouvoir rêver car elle nous offre à voir des œuvres romantiques, inquiétantes sans nous donner la clé. A nous de rêver et d’adopter son monde.

J’ai exposé Corinne Tichadou à la galerie Mercure en 2009. L’époque était aux petits flacons … Dix ont passé, j’ai retrouvé Corinne dans ma nouvelle galerie EP à Béziers. Nous avons fait durant deux ans un bon chemin ensemble. Je lui souhaite une grande réussite et un bel avenir. La suite est encore longue lorsque tous ces personnages auront trouvé vie sur ses œuvres et dans notre imaginaire à nous, nous avons droit j’en suis persuadée à d’autres surprises. Suivez là, suivons là … Elle nous étonnera.

Elyette Peyre